CNUCC : 20 ans de lutte des Nations Unies contre la corruption

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Photo de la façade de la salle dans laquelle la conférence COSP10 a été organisée. À gauche, à côté d'un drapeau américain, Ghada Waly prononce un discours derrière un podium. À droite, cinq autres personnes sont assises derrière une table

Ghada Waly, Directrice générale de l’ONUDC, s’adresse à l’auditoire à l’ouverture de la COSP10 (© UNIS Vienna).

La corruption prive les sociétés de moyens de subsistance et d'espoir. C'est pourquoi l'ONU s'efforce depuis 20 ans d'endiguer la corruption. Avec un succès évident, même si certaines formes de corruption restent tenaces. Au sein des Nations Unies, la Belgique se concentre principalement sur la corruption et les crimes contre l'environnement.

L'Organisation des Nations Unies (ONU) est un arbre aux multiples branches. Saviez-vous qu'il existe également un organisme qui lutte contre la corruption ? En 2003 – il y a environ 20 ans – l'ONU a établi la Convention des Nations Unies contre la corruption (CNUCC), le premier et le seul instrument juridiquement contraignant de lutte contre la corruption de la communauté internationale. Avec 190 pays ayant souscrit à la convention, on peut dire qu'elle a une validité quasi-universelle.
 

Abus de position


La corruption existe sous de multiples formes. Il s'agit toujours d'une personne qui abuse de sa position (de pouvoir) pour fournir des services non autorisés à elle-même ou à d'autres personnes, dans ce dernier cas contre rémunération ou en échange de services réciproques ou d'une faveur.

Pensez aux pots-de-vin que vous devez payer pour obtenir d'un fonctionnaire un service auquel vous avez pourtant droit. Ou à un investisseur qui soudoie un fonctionnaire pour obtenir illégalement un permis d'abattage d'une parcelle de forêt en vue d'une exploitation agricole ou minière. Ou encore à une entreprise qui refile des pots-de-vin pour qu'une réglementation soit formulée de manière à lui profiter.
 

Objectifs de développement durable 


Il est évident que la corruption porte atteinte à l'intégrité, à la bonne gouvernance et à l'honnêteté, mais aussi aux droits humains. Elle ronge les fondements des institutions démocratiques en perturbant les élections et en érodant l'État de droit.

Des pratiques telles que la traite des êtres humains, la contrebande, le blanchiment d'argent, l'évasion fiscale et la criminalité environnementale sont autant d'activités qui se nourrissent de la corruption. La corruption soutient également les réseaux criminels internationaux.

Le développement économique souffre également beaucoup de la corruption. Par exemple, dans certains pays, elle décourage les investissements étrangers, tandis que les petites entreprises ont du mal à démarrer, voire sont dans l'impossibilité de le faire, parce qu'elles ne peuvent pas supporter les « coûts de démarrage » que leur imposent les pratiques de corruption.

En bref, l'impact négatif de la corruption va loin. Presque tous les Objectifs de développement durable (ODD) – la feuille de route des Nations unies pour un monde meilleur d'ici 2030 – en pâtissent. En d'autres termes, les efforts de lutte contre la corruption sont essentiels pour accélérer la réalisation des ODD.
 

Examen par les pairs


C'est précisément la prise de conscience de l'énorme impact mondial de la corruption qui a incité les Nations Unies à lancer une convention contre la corruption en 2003. Tous les pays signataires acceptent de prendre conjointement des mesures contraignantes pour endiguer la corruption. Le mandat couvre cinq domaines : la prévention, la répression, la récupération des biens volés, la coopération internationale et l'assistance technique.

L'outil de base à cette fin est « l'examen par les pairs » (peer review). Chaque pays est régulièrement contrôlé par deux autres. Ce rapport contient une série de recommandations visant à améliorer les politiques de lutte contre la corruption. En 2017, par exemple, la Belgique a été évaluée pour la prévention et la récupération de biens. Notre pays obtient d'assez bons résultats en matière de prévention, mais il y a encore des points à améliorer. Ainsi, les institutions judiciaires ne collaboraient pas suffisamment et les échanges de données étaient insuffisants en raison de l'incompatibilité des systèmes.
 

Une prise de conscience croissante


Au cours des 20 années d'application de la CNUCC, les examens par les pairs ont permis d'identifier plus de 9 000 lacunes dans la mise en œuvre de la convention, ainsi que 4 000 besoins d'assistance technique. Les plateformes régionales de lutte contre la corruption facilitent le partage des bonnes pratiques et des défis. Cela permet aux pays de mettre en œuvre plus rapidement les décisions de la CNUCC.

La CNUCC peut certainement déjà inscrire de bons résultats à son palmarès. Ainsi, depuis 2010, 4,3 milliards de dollars de biens obtenus par la corruption ont pu être restitués aux pays où ils ont été volés. Mais surtout, la prise de conscience de l'importance de la lutte contre la corruption a progressé. Certaines pratiques autrefois courantes sont aujourd'hui inacceptables. Par exemple, une entreprise européenne qui tente d'accéder à un marché asiatique par l'intermédiaire de son gouvernement.

Les pays du Sud sont également de plus en plus conscients que la corruption nuit à leur développement. Les pays les plus pauvres sont également ceux qui souffrent le plus de la corruption. Entre 2011 et 2020, 37,6 % des habitants des pays à faible revenu ont dû payer un pot-de-vin pour obtenir un service public, contre 7,2 % dans les pays à revenu élevé. Souvent, ils ne peuvent obtenir un prêt du Fonds monétaire international que s'ils luttent contre la corruption avec suffisamment de vigueur.

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Photo d'un panneau sur lequel sont accrochées plusieurs affiches comportant chacune la photo d'une personne et une citation.

Des affiches avec des citations de jeunes sur la corruption (© UNIS Vienna).

La jeunesse en mouvement


Tous les deux ans, toutes les « parties » à la convention – les pays signataires – se réunissent pour discuter des progrès accomplis. En décembre 2023, la 10e COSP – Conference of the State Parties – s'est tenue à Atlanta, aux États-Unis. On notera la présence importante du secteur privé, de la société civile et de la jeunesse. En effet, tous ont un rôle essentiel à jouer dans la lutte contre la corruption.

« Nous, les jeunes, sommes victimes de la corruption », a déclaré un jeune. « Des victimes privées d'opportunités et privées de l'avenir dont nous rêvons. En tant que victimes de la corruption, nous devrions avoir notre mot à dire pour résoudre le problème. »

Le contexte géopolitique actuel a rendu difficile l'obtention d'un consensus. Pourtant, la grande majorité des partis continue de soutenir sans réserve la convention. Comme l'a déclaré Ghada Waly, directrice exécutive de l’ONUDC), « la conférence a montré que la convention est plus pertinente que jamais en ces temps de confiance fragile et de remise en cause de l'État de droit. La convention a un grand potentiel pour avoir plus d'impact. »
 

La Belgique et les crimes contre l'environnement


La lutte contre la corruption est également une priorité pour notre pays. Au sein de la CNUCC, la Belgique se concentre principalement sur la corruption et les crimes contre l'environnement. Par exemple, lors de la conférence COSP10, le représentant belge a présenté un rapport cofinancé par la Belgique : Rooting out Corruption an Introduction to Addressing the Corruption Fuelling Forest Loss. L'étude affirme que seul un large éventail de mesures peut permettre de prévenir, de détecter et de supprimer la corruption en matière de déforestation. Auparavant, notre pays avait déjà dépensé 2 millions d'euros pour réduire le commerce illégal de l'ivoire, des bois exotiques et de la viande de brousse en Afrique, entre autres.

La CNUCC relève de l'Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), basé à Vienne.
 

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