La Belgique, soutien indéfectible d’une Cour pénale internationale indépendante et impartiale

  1. Dernière mise à jour le
Image
Bâtiment de International Criminal Court| Cour Pénale Internationale

La Cour pénale internationale de La Haye. © Getty Images

Notre pays a toujours été un fervent défenseur de la Cour pénale internationale (CPI). Le monde a en effet besoin d'une cour indépendante et impartiale, compétente pour juger des crimes de guerre, crimes contre l'humanité, génocides et crimes d'agression. Son statut de membre du Bureau de l'Assemblée des États parties (2024-2026) offre à la Belgique l’occasion de soutenir encore plus activement la Cour dans sa mission.

La Belgique soutient pleinement la Cour pénale internationale – ci-après « la Cour » – depuis le lancement de ses activités à La Haye en 2002. Notre pays attache en effet une importance cruciale au fait que les crimes graves – crimes de génocide, crimes contre l’humanité, crimes de guerre, crimes d'agression –ne restent pas impunis et à ce que les victimes soient entendues et indemnisées (voir encadré).

La Belgique considère dès lors la Cour comme un organe unique et indispensable, la justice étant une condition essentielle à une paix durable. Le monde a besoin d'une cour qui, en complément des juridictions pénales nationales, puissent juger ces crimes graves en toute impartialité et indépendance.

La Cour pénale internationale en quelques mots

La Cour pénale internationale, dont le siège est établi à La Haye, a été créée en 2002 en tant que cour impartiale et indépendante – qui n'appartient pas au système onusien – appelée à se prononcer sur des crimes graves, à savoir (1) les crimes de génocide (commis à l’encontre d’un groupe de population déterminé), (2) les crimes contre l'humanité, (3) les crimes de guerre et (4) les crimes d'agression. Ces graves violations ne se limitent pas au meurtre, elles englobent d’autres actes tels que l'emprisonnement, le viol, la torture et l’esclavage sexuel.

La Cour assure un rôle complémentaire par rapport aux tribunaux pénaux nationaux, prenant uniquement en charge les affaires que les États n’ont pas la capacité ou la volonté de juger. Elle examine ainsi systématiquement si les plaintes déposées ne peuvent pas être traitées par l’État concerné.

Si la Cour délivre un mandat d'arrêt, tous les États parties sont tenus d'arrêter la personne accusée et de la remettre à la Cour, dès que cette personne pose un pied sur leur territoire.

Toutefois, la Cour ne dispose pas de forces de police et doit donc compter sur la coopération des États pour l'exécution des mandats d'arrêt. Cela dit, les États parties ont l’obligation générale de coopérer pleinement avec la Cour pénale.

La Belgique a conclu huit accords de coopération spécifiques avec la Cour et a déjà soutenu ses opérations par le biais d’une coopération judiciaire substantielle. La coopération avec la Cour pénale internationale relève de la compétence de l'Autorité centrale sous la responsabilité du directeur du département Droit international humanitaire du SPF Justice.

Jusqu’à présent, 124 pays ont ratifié le Statut de Rome, traité fondateur de la Cour. Un certain nombre de pays influents n’y ont pas encore souscrit. Parmi eux figurent les États-Unis, la Chine, la Russie, la Turquie, l’Inde, l’Arabie saoudite et Israël.

La Cour mérite pourtant une reconnaissance universelle, ce que la Belgique ne cesse de prôner. En effet, la compétence de la Cour porte sur (1) les crimes commis par les ressortissants d’un Etats partie, y compris ceux commis sur le territoire d’un Etat non-partie 2) les crimes commis sur le territoire d’un Etat partie, y compris ceux commis par des ressortissants d’un Etat non-partie.

C’est pourquoi la Cour peut également requérir un mandat d’arrêt contre les dirigeants du Hamas pour des crimes commis sur le territoire israélien bien qu’Israël ne soit pas partie au Statut de Rome. Elle peut également intervenir en cas d’éventuels crimes commis par la Russie en Ukraine et par Israël à Gaza.

Attention : ne confondez pas la Cour pénale internationale et la Cour internationale de justice, également établie à La Haye. Cette dernière est l’organe judiciaire principal de l’ONU qui traite exclusivement les différends entre États.

Plusieurs amendements

La Belgique s’emploie entre autres à renforcer le cadre juridique de la Cour. Nous avons ainsi proposé plusieurs amendements – qui ont été adoptés – visant à inclure de nouveaux crimes de guerre à son mandat tels que l’utilisation d’armes biologiques ou d’armes laser, lesquelles peuvent provoquer une cécité permanente.

Qui plus est, notre pays plaide en faveur d’un élargissement maximal de la compétence de la Cour en matière de « crimes d’agression ». Nous estimons par ailleurs que l’écocide –autrement dit, la destruction massive des écosystèmes – pourrait être ajouté aux crimes relevant de la compétence de la Cour.

La Belgique contribue également au budget de la Cour. La cotisation annuelle obligatoire s’élève à environ 2,2 millions d’euros, sur un budget total de quelque 200 millions d’euros. En parallèle, notre pays fournit un financement volontaire destiné entre autres au Fonds au profit des victimes (voir encadré), au Fonds de sanctions du Procureur (5 millions d’euros) et au Fonds spécial du greffier pour la sécurité de la Cour (700 000 euros).
 

Image
L'audience est en cours dans la salle d'audience de la CPI

L’une des salles d’audience de la Cour pénale internationale. © ICC-CPI/Marco Okhuizen

Menaces de sanctions

La Belgique apporte également un soutien politique sans faille. La Cour est en effet régulièrement la cible d’attaques. Citons notamment les cyberattaques hautement professionnelles et les menaces de sanctions à l’encontre des magistrats élus.

En outre, certains pays menacent parfois d’appliquer de lourdes sanctions, comme l’ont fait récemment les États-Unis. La Cour prépare un éventuel mandat d’arrêt à l’encontre du premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou et de son ministre de la Défense Yoav Gallant, ainsi que de trois responsables du mouvement terroriste Hamas (dont deux sont récemment décédés). Rapidement, la Chambre des représentants aux États-Unis a voté une loi imposant des sanctions contraignantes et des restrictions en matière de visas à « toute entité étrangère qui coopère avec la Cour ou lui fournit des fonds dans le cadre de poursuites engagées contre les États-Unis, Israël ou tout autre allié des États-Unis qui n’est pas membre de la Cour ».

Si cette décision est également adoptée par le Sénat américain, elle pourrait compromettre le fonctionnement de la Cour. Par exemple, des entreprises actives dans les télécommunications et la cybersécurité ne pourraient ou ne souhaiteraient plus coopérer avec elle.

Déclaration de soutien

Devant cette menace, nos diplomates ont milité auprès des autorités américaines pour qu’elles n’appliquent pas ces sanctions. De plus, la Belgique a coordonné – en collaboration avec la Slovénie, le Chili, la Jordanie et le Sénégal – une déclaration en soutien à la Cour. Jusqu’à présent, 93 des 124 pays qui sont parties à la Cour lui ont déjà témoigné leur soutien.

Cette déclaration rappelle le rôle décisif de la Cour dans l’architecture internationale pour la paix et la sécurité. Elle affirme également que des atteintes aussi graves à l’indépendance et à l’impartialité de la Cour sont inacceptables.

La Belgique n’a de cesse d’exprimer son soutien inconditionnel à la Cour pénale et de respecter son indépendance et son impartialité. Notre pays exhorte les autres États parties à suivre son exemple.

Le Fonds au profit des victimes : les victimes aussi méritent justice

La Cour pénale internationale a la grande particularité d’également réserver une place aux victimes dans ses procédures. Les victimes ont droit à réparation, y compris un accompagnement psychologique (santé mentale), la revalidation physique, un soutien matériel et le rétablissement du tissu social. L’objectif est d’offrir aux victimes, à leurs familles et à leurs communautés une paix durable.

Ces réparations ne sont pas financées par le budget de fonctionnement de la Cour mais par les peines d’amendes et les mesures de confiscation prononcées, en sus des contributions volontaires auxquelles la Belgique participe d’ailleurs régulièrement.

Bureau de l’Assemblée

Depuis 2024, la Belgique est devenue membre du Bureau de l’Assemblée des États parties pour trois ans. Ce bureau est à la tête de l’Assemblée, qui porte entre autres la responsabilité d’adopter le budget annuel et de définir des lignes directrices pour l’administration de la CPI. Ainsi, notre pays contribue à guider le fonctionnement interne de la Cour.

Le Bureau de l’Assemblée compte 21 membres, représentant autant que possible les différentes régions géographiques. Mais cette distribution pourrait être plus équitable. L’un des dossiers qui sera examiné au cours du mandat de la Belgique au sein du Bureau vise à mieux représenter les pays africains.

Autre question à l’ordre du jour : le droit de vote des pays qui n’ont pas payé leur contribution obligatoire. Normalement, les États parties perdent leur voix au bout de deux ans de défaut de paiement. Mais à l’heure actuelle, ils la retrouvent trop facilement. Il importe dès lors d’élaborer des critères plus stricts pour la restitution du droit de vote.

En sa qualité de membre du Bureau, notre pays pèse davantage dans la balance pour améliorer le fonctionnement de la Cour, dans le respect de son indépendance. Au sein du Bureau, la Belgique a également accès à de très nombreuses informations. Nous restons constamment en contact avec les États membres, notamment en Afrique et en Amérique latine, ce qui nous assure une bonne compréhension de leurs priorités.

Critique

La Cour se heurte à de nombreuses critiques. On lui reproche entre autres sa lenteur. Pourtant, depuis sa création en 2002, la Cour peut déjà se targuer de beaux résultats. Jusqu’à présent, 57 personnes ont été traduites en justice, 5 enquêtes ont été clôturées (Ouganda, Kenya, Géorgie…) et 12 sont encore en cours (Ukraine, Venezuela, République démocratique du Congo, Soudan…). En outre, la Cour a prononcé 5 condamnations et entamé 4 procédures de réparation, dont une vient de s’achever.

Il ne faut pas non plus perdre de vue la complexité des crimes examinés. La Cour doit collecter les preuves sur place, faire venir les témoins à La Haye et les protéger, sans oublier le droit des accusés de se défendre. Toutes ces procédures demandent énormément de temps et d’efforts.

Parmi les critiques récurrentes, la Cour se voit reprocher de viser essentiellement les pays africains. À cet égard, il faut souligner que ce sont surtout des pays africains qui ont contribué à la création de la Cour. De fait, l’Afrique y est actuellement la région la plus représentée. De plus, de nombreux pays d’Afrique font appel à la Cour parce que leur propre système judiciaire n’est pas en mesure de juger les crimes commis.

Par ailleurs, la Cour traite bel et bien des dossiers similaires sur d’autres continents tels que l’Amérique latine (Venezuela, Colombie…) et l’Asie (Afghanistan, Bangladesh/Myanmar). Récemment, l’Ukraine et la Palestine sont venues s’ajouter à la liste des pays concernés.

Sur la bonne voie

La Cour est donc sur la bonne voie. Un test important l’attend, selon que les États-Unis décident d’appliquer ou non leurs sanctions. Une telle décision pourrait pour ainsi dire paralyser le fonctionnement de la Cour.

Quoi qu’il en soit, la Cour continue de perfectionner ses actions, entre autres pour garantir son indépendance et son impartialité. En sa nouvelle qualité de membre du Bureau de l’Assemblée, notre pays entend s’investir davantage encore à cette fin. Une Cour pénale internationale solide à vocation universelle devient plus nécessaire que jamais, tout particulièrement à l’heure du repli sur soi de chaque pays et groupe de pays. Car nulle part, les graves violations du droit international ne devraient rester impunies.