La coopérative de cacao Yeyasso s’adapte aux grandes tendances

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Passerelle YEYASSO Tous Ensemble Pour Un Avenir Meilleur

La coopérative Yeyasso : tous ensemble pour un avenir meilleur. © Beyond Chocolate

La Belgique a remarquablement contribué à la réussite de Yeyasso, une coopérative de cacao et de café située en Côte d'Ivoire. Aujourd'hui, elle produit 6 000 tonnes de cacao sur un peu plus de 9 500 hectares. En outre, elle mise sur la production bio et le commerce équitable, l'agroforesterie et l’abolition du travail des enfants. Yeyasso veut aussi obtenir des crédits carbone.
 

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ODD 1 pas de pauvreté - ODD 12 consommation et production responsables


Lorsque la coopérative de cacao et de café a été fondée en 2006, elle comptait à peine 350 membres, dont seulement une dizaine de femmes. Toutefois, les fondateurs ont résolument opté pour le nom de « Yeyasso », qui signifie « Village de l'espoir ».

Et miser sur l’espoir s'est avéré très judicieux puisqu’aujourd'hui, Yeyasso compte plus de 7 200 membres, dont 15 % de femmes. Ensemble, ils produisent chaque année 6 000 tonnes de cacao sur un peu plus de 9 500 hectares. Sur 3 300 hectares supplémentaires, ils récoltent 2 500 tonnes de café. De plus, ils répondent parfaitement aux grandes tendances comme l'agriculture forestière (agroforesterie) et la production bio et issue du commerce équitable.
 

Coaching


Le véritable tournant s’est opéré en 2016. À cette époque, la coopérative a répondu à un appel d'Enabel (l'agence belge de développement) pour participer à un programme de coaching sur deux ans. En effet, le Trade for Development Centre (TDC) (qui relève d’Enabel) soutient les coopératives pour pouvoir mieux se profiler sur les marchés nationaux et internationaux.

À ce moment, l'entreprise de chocolat belge Galler recherchait des fournisseurs (commerce équitable) certifiés garantissant des conditions de travail décentes et des revenus plus élevés aux producteurs. Le coaching par TDC a permis à Yeyasso de travailler de manière bien plus professionnelle grâce, entre autres, à une analyse plus approfondie des données financières et commerciales et à la mise en place de partenariats. En 2020, Yeyasso a obtenu le label fairtrade.
 

Agroforesterie


Tout s'est ensuite enchaîné. Par après, elle a également obtenu le soutien de la Business Partnership Facility, une initiative de la Coopération belge au Développement qui soutient les entreprises des pays en développement qui contribuent aux Objectifs de développement durable (ODD).

Grâce à ces fonds (200 000 euros), Yeyasso a introduit l'agroforesterie. Les cacaoyers et les caféiers se développent mieux à l'ombre d'autres arbres. Avec l'assistance technique de l'Université de Liège, Yeyasso a créé quatre pépinières. Entre-temps, plus de 80 000 arbres ont déjà été plantés, ce qui a permis de faire prospérer les cacaoyers et les caféiers.
 

Riz et manioc


Yeyasso a également misé sur la culture du riz et du manioc. En effet, pour garantir des revenus décents, il ne suffit pas de payer le cacao à un prix équitable. Les familles de cultivateurs de cacao doivent également devenir plus résilientes, ce qui passe par la culture d'autres produits. La culture du riz et du manioc résulte principalement de la volonté  des femmes qui ne sont généralement pas impliquées dans les étapes rentables de la culture du cacao. La diversification des cultures permet aux familles de continuer à disposer d'un revenu même pendant les périodes financièrement difficiles.

Enfin, 6 femmes et 2 hommes ont pu renforcer leurs compétences à la Women’s School of Leadership of Fairtrade Africa, et devenir ainsi ensuite ambassadeurs de la coopérative. En 2022, deux des femmes ont été élues au conseil d'administration.

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Le chef Moussa Yeo près d’un cacaoyer

Le chef Moussa Yeo continue de faire tout ce qu’il peut pour offrir de la qualité et aider tous les membres à aller de l’avant. © Beyond Chocolate

Crédits carbone


En 2022, Yeyasso a obtenu à nouveau 200 000 euros de la Business Partnership Facility. L'objectif : réagir encore mieux aux grandes tendances du marché du cacao, aujourd'hui et à l'avenir. Après tout, les programmes de certification et de durabilité deviennent la norme. Il suffit de penser à la législation de l'UE sur le devoir de diligence (due diligence) qui est en cours d'élaboration. Yeyasso veut donc travailler de manière entièrement bio, pratiquer le commerce équitable, de manière neutre en carbone et sans recourir au travail des enfants ni au déboisement.

L'un des projets consiste à mesurer la quantité de carbone que les arbres plantés éliminent de l'atmosphère. La coopérative veut ainsi obtenir des crédits carbone qui peuvent être utilisés pour augmenter les revenus des agriculteurs. De plus, Yeyasso prévoit de doubler la production de cacao bio-équitable à partir de 2026 : de 120 à 240 tonnes par an. Enfin, elle souhaite mettre fin à toutes les formes de travail des enfants dans la culture du cacao.
 

Beyond Chocolate


Mais l'histoire ne s'arrête pas là. Yeyasso a également été sélectionné comme étant l'un des projets pilotes (2020-2025) de Beyond Chocolate, l'initiative visant à rendre tout le chocolat belge durable d'ici 2030. Grâce à ce projet, 165 agriculteurs de la coopérative ont reçu à ce jour une certification biologique. En partie grâce à de bonnes pratiques agricoles - taille, désherbage et lutte contre les parasites - leurs rendements n'ont baissé que de 1 %.

La qualité des fèves de cacao a aussi considérablement augmenté grâce à des infrastructures de séchage adaptées et à un centre de fermentation. Normalement, les agriculteurs procèdent eux-mêmes à la fermentation de leurs fèves de cacao. Cependant, en faisant fermenter toutes les fèves ensemble (et donc en plus grande quantité), il est possible d'atteindre une température plus élevée, ce qui en améliore la saveur.

Pour se diversifier encore davantage, l'accent a été mis sur les poules pondeuses. En outre, le TDC a poursuivi ses activités de coaching afin de préparer les agriculteurs au marché bio : identification d'acheteurs potentiels, préparation aux foires bio...

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Les employés chargent les fèves de cacao dans des sacs

Yeyasso en action : les fèves de cacao de haute qualité sont chargées dans des sacs. © Dominique Derom/TDC/Enabel

Galler


Pour le projet pilote Beyond Chocolate, la chocolaterie Galler a contribué aux deux tiers des fonds, soit quelque 250 000 euros. Depuis 2021, Galler produit exclusivement du chocolat issu du commerce équitable. Chaque année, l'entreprise achète 1 000 tonnes de fèves de cacao à Yeyasso, soit un sixième de sa production. Yeyasso fournit également des fèves de cacao à SACO, une division ivoirienne de Barry Callebaut.

Outre Galler et le TDC, le projet pilote comptait parmi ses partenaires la société de consultance en cacao ZOTO et les universités de Gand et de Gembloux.
 

Revenu décent


En collaboration avec Yeyasso, le TDC, Fairtrade Belgium et Galler ont également lancé un projet pilote visant à obtenir une vision claire des revenus des agriculteurs de Yeyasso. Ainsi, les membres devaient tenir une sorte de journal de bord contenant l’ensemble de leurs revenus et de leurs dépenses, ainsi que des informations sur la taille de l'exploitation et la composition de la famille.

L'étude a révélé que seuls 21 % des membres de la coopérative gagnaient un salaire décent. 11 % d'entre eux se trouvaient encore en situation d’extrême pauvreté. La taille du site joue un rôle important. En effet, ce sont surtout les agriculteurs disposant de suffisamment de terres qui parviennent à dégager un revenu décent. Des efforts supplémentaires doivent également être déployés pour diversifier les activités, accroître la productivité, etc.
 

Implication


La réussite de Yeyasso porte donc clairement l’empreinte de la Belgique. La qualité de ces résultats découle en partie d’une plus grande résilience des agriculteurs. Ainsi, la diversification des labels et des acheteurs est essentielle pour faire face aux fluctuations du marché du cacao. Et grâce aux marchés de niche tels que l'agriculture bio et le commerce équitable, les agriculteurs obtiennent un prix plus élevé pour leur cacao. Le label « fairtrade », par exemple, se traduit par un prix supérieur de 13 %. La plus grande variété de cultures permet également aux agriculteurs d'obtenir un revenu décent.

Toutefois, un tel revenu reste encore hors de portée de 79 % des membres. La coopérative et son PDG Yeo Moussa restent déterminés à fournir un niveau de qualité élevé et à faire progresser tous ses membres grâce à une solide valeur ajoutée. L'esprit d'entreprise et la motivation ne manquent pas