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Philemon Yang (au centre), Président de la soixante-dix-neuvième session de l’Assemblée générale des Nations Unies, clôt le Sommet du futur. Le Secrétaire général, M. António Guterres, est à droite et Movses Abelian, Secrétaire général adjoint à l’Assemblée générale est à gauche. © UN Photo/Loey Felipe
Le Pacte pour l’avenir élaboré lors du Sommet de l’avenir des Nations Unies offre une base solide en vue de l’adaptation du fonctionnement des institutions de l’ONU pour répondre aux besoins de notre époque. Si le texte est peut-être légèrement moins innovateur qu’initialement attendu, il n’en reste pas moins une étape majeure pour raviver la confiance envers le multilatéralisme.
En juillet 2024, nous évoquions avec force détails le Sommet de l’avenir de l’ONU prévu en septembre. Ce sommet devait formuler une réponse au mécontentement grandissant du Sud global à l’égard du fonctionnement des organisations onusiennes et des institutions financières internationales.
Une polarisation croissante
Cette idée a germé en 2020, en pleine pandémie de coronavirus et dans le contexte du 75e anniversaire des Nations Unies. Compte tenu de l’insatisfaction face l’inégalité de la gestion de la pandémie et de l’aggravation du retard des Objectifs de développement durable (ODD), les États Membres de l’ONU ont insisté sur la nécessité d’une réforme de la gouvernance mondiale afin qu’elle serve plus efficacement les générations actuelles et futures. Le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a répondu à cette demande en septembre 2021 avec la proposition « Notre programme commun », dont le Sommet de l’avenir constitue un corollaire.
Les négociations relatives au Pacte pour l’avenir se sont déroulées dans un contexte géopolitique des plus compliqués. En effet, l’invasion de l’Ukraine par la Russie en 2022 et le conflit à Gaza depuis 2023 ont accentué la polarisation.
Le Pacte pour l’avenir
Si l’on attendait au départ du Sommet de l’avenir qu’il engendre des changements plutôt révolutionnaires, ces expectatives ont rapidement été tempérées. Nombre de faiseurs d’opinions craignaient un raté. Finalement, le Sommet de l’avenir a tout de même permis de conclure un accord menant à l’adoption d’un Pacte pour l’avenir.
L’UE a joué un rôle charnière lors de la phase préparatoire de cet accord. Par ailleurs, l’Allemagne, les Pays-Bas et la Suède ont agi en qualité de co-facilitateurs, respectivement dans le cadre du Pacte pour l’avenir, de la Déclaration sur les générations futures et du Pacte numérique mondial.
Le pacte qui en résulte ne s’avère certes pas aussi innovateur qu’initialement espéré, mais il pose néanmoins une base solide pour adapter les institutions des Nations Unies au contexte actuel.
Le Conseil de sécurité de l’ONU
Par exemple, le pacte appelle clairement à une réforme du Conseil de sécurité de l’ONU, afin que les différents (groupes de) pays s’y sachent mieux représentés. À cet égard, la priorité est de rectifier la sous-représentation historique de l’Afrique, de l’Amérique latine et de la région Asie-Pacifique. En outre, l’utilisation du droit de veto par les membres permanents du Conseil de sécurité devrait être limitée.
La paix et la sécurité
Le désarmement nucléaire et la réglementation internationale de l’espace extra-atmosphérique, comptent également parmi les sujets abordés, de même que la volonté de prévenir le détournement des nouvelles technologies dans le cadre du développement d’armes.
Le pacte établit également la nécessité qui se pose aujourd’hui d’aborder les conflits sous un angle différent. En effet, le recours aux campagnes de désinformation et aux cyberattaques les a rendus beaucoup plus complexes et nous devons dès lors miser davantage sur la prévention.
Par ailleurs, le déploiement d’opérations de maintien de la paix – les casques bleus incarnant évidemment le symbole de l’engagement des Nations Unies – doit être réévalué pour s’adapter à l’évolution rapide du contexte des conflits.

La Reine Mathilde était également présente à New York, en sa qualité de Défenseure des ODD de l’ONU. © SPF Affaires étrangères
Les ODD
L’objet principal du sommet était d’apporter un nouveau souffle aux ODD, une mission accomplie avec brio. Le renouvellement de cet engagement était primordial : en effet, à ce jour, seulement 17 % des Objectifs de développement durable sont en bonne voie. Dans le même ordre d’idées, le pacte réaffirme les engagements existants en matière de climat et d’environnement, deux éléments cruciaux aux yeux des pays en développement.
La Banque mondiale et le FMI
Le Pacte pour l’avenir donne également une impulsion à la réforme des institutions financières internationales telles que la Banque mondiale et le Fonds monétaire international. Les pays en développement devraient y avoir davantage leur mot à dire dans le processus décisionnel. De surcroît, les banques multilatérales de développement devraient accroître les financements mobilisés pour aider les pays en développement dans leurs besoins sur ce plan. L’« architecture de la dette » devrait être réformée pour permettre aux pays en développement d’investir de manière plus durable dans leur avenir.
Les droits humains
Ce sujet n’a pas bénéficié d’un chapitre distinct, mais le Pacte pour l’avenir contient malgré tout un très grand nombre de références aux droits humains, un point d’attention qui, traditionnellement, compte parmi les priorités de la Belgique et de l’UE.
Bien que l’UE n’a pas obtenu tout ce qu’elle espérait, le pacte comprend tout de même des points d’action importants dans les domaines de l’égalité des genres, l’autonomisation des femmes et la nécessité de protéger les défenseurs des droits humains. Le Haut-Commissariat aux droits de l’homme (HCDH), quant à lui, reçoit un plus grand financement.
La Déclaration sur les générations futures
Outre le Pacte pour l’avenir, le Sommet a également abouti à la rédaction d’une Déclaration sur les générations futures, à titre d’addendum. En effet, toutes les décisions prises aujourd’hui auront des répercussions sur les générations futures, une incidence qui sera davantage prise en considération. Les jeunes eux-mêmes ont largement eu voix au chapitre à l’occasion des journées d’action précédant le Sommet de l’avenir et lors des allocutions d’ouverture.
Le Pacte numérique mondial
Le Pacte numérique mondial constitue un addendum complémentaire au Pacte pour l’avenir. Il établit un cadre global en matière de coopération numérique et de gestion de l’intelligence artificielle (IA). Il aborde, entre autres, la sécurité sur Internet, en particulier pour les enfants, la lutte contre la désinformation et la facilitation du partage de données.
Un suivi crucial
L’adoption du pacte ne s’est pas déroulée sans peine. Jusqu’au dernier moment, les tentatives d’affaiblir le texte n’ont pas manqué, mais en fin de compte, le pacte adopté s’avère tout de même plutôt avant-gardiste.
Selon la formule d’António Guterres, Secrétaire général de l'ONU : « Nous avons ouvert la porte. Il nous incombe désormais à toutes et à tous de la franchir, alors maintenant mettons-nous au travail ». Cette base solide doit à présent être transposée en mesures concrètes et, à cet égard, le suivi jouera un rôle crucial. En effet, 2025 approche et, avec lui, une conférence sur le financement du développement ainsi qu’un sommet social mondial. Enfin, le prochain sommet sur le climat (COP29) s’appuiera sur les engagements relatifs au climat.
Le multilatéralisme n’est pas mort
L’existence même d’un accord concernant un Pacte pour l’avenir prouve qu’une volonté politique suffisante subsiste pour rétablir la confiance dans le multilatéralisme. Le multilatéralisme n’est pas mort !
La Belgique, aux côtés de l’UE, s’est déjà résolument engagée afin d’obtenir le résultat le plus ambitieux possible. Le multilatéralisme fait partie de notre ADN, notamment parce que notre pays a conscience que nous dépendons de l’étranger. Ainsi, notre stratégie de sécurité nationale en 2022 reconnaissait déjà pleinement l’importance de la politique extérieure pour notre propre sécurité. La sécurité extérieure et intérieure sont de plus en plus intrinsèquement liées. Il va donc de notre intérêt de bénéficier d’institutions internationales efficaces et d’un ordre juridique international.
Notre pays a l’intention de poursuivre ses efforts pour contribuer à la réalisation des engagements inscrits au Pacte pour l’avenir. Main dans la main avec l’UE, nous nous sommes déjà positionnés en tant que partenaire constructif vis-à-vis du Sud global à l’occasion du Sommet de l’avenir. Nous entendons bien continuer sur cette lancée.
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