Protéger les mangroves pour assurer l’avenir des pêcheurs

L’ONG belge Louvain Coopération s’investit dans le reboisement des mangroves disparues de Madagascar. Ces forêts inondées jouent un rôle crucial dans la conservation des populations de poissons et la protection des littoraux. Elles stockent en outre d’énormes quantités de CO2.

  1. Dernière mise à jour le
Image
Mangrove

Vue d'une replantation réussie d'une mangrove à Madagascar. © Louvain Coopération

L’ONG belge Louvain Coopération s’investit dans le reboisement des mangroves disparues de Madagascar. Ces forêts inondées jouent un rôle crucial dans la conservation des populations de poissons et la protection des littoraux. Elles stockent en outre d’énormes quantités de CO2.

Image
Pas de pauvreté et Vie aquatique

Totalement absentes d’Europe, les mangroves constituent des paysages caractéristiques des zones (sub)tropicales. Au total, elles couvriraient encore une superficie de 150 000 km², soit cinq fois le territoire de la Belgique, dont un cinquième en Indonésie.

Ces forêts côtières ou inondées occupent généralement les zones de marais maritimes riches en limon des régions (sub)tropicales. Les palétuviers, arbres ou arbustes qui les composent, forment des enchevêtrements de racines aériennes caractéristiques et sont parfaitement adaptés à la vie en milieu salin.

Puits de carbone et trésors de biodiversité

Les mangroves remplissent des fonctions très diverses et jouent un rôle extrêmement important pour l’ensemble de la planète. Tout d’abord, elles hébergent une impressionnante biodiversité. Tandis qu’elles offrent aux poissons un abri idéal pour frayer, coquillages, oiseaux, insectes et mammifères y vivent en toute tranquillité. Ces forêts abritent également des espèces emblématiques telles que l’ibis rouge en Amérique du Sud ou les pygargues de Madagascar, menacés d’extinction. Elles renferment en outre une grande variété de plantes médicinales.

De plus, les mangroves stockent d’énormes quantités de carbone, ce qui fait d’elles des armes essentielles dans la lutte contre le dérèglement climatique. Par ailleurs, elles protègent les côtes de l’érosion mais aussi des phénomènes météorologiques extrêmes tels que les ouragans ou les tsunamis, susceptibles de devenir de plus en plus fréquents au fur et à mesure du dérèglement climatique. Enfin, les mangroves améliorent la qualité de l’eau en filtrant les polluants qu’elle charrie.

Image
Replantation mangrove

Une grande partie des mangroves de Madagascar a été détruite. © Louvain Coopération

Plus de 40 % des mangroves disparues

Pourtant, les mangroves disparaissent. Selon l’UNESCO, leur superficie aurait reculé de 40 % entre 1980 et 2005, principalement en raison de l’aménagement des littoraux. C’est le cas à Madagascar, une vaste île de l’Océan indien, à hauteur du Mozambique. Les forêts inondées y occupent encore 3000 à 4000 km², majoritairement sur la côte occidentale de l’île. Mais la surface détruite aurait atteint 25 % en 23 ans.

La disparition des mangroves à Madagascar s’explique avant tout par le changement climatique et la pression démographique. Dans le sud de l’île, régulièrement victime de graves sécheresses, les habitants n’ont d’autre choix que de migrer vers les côtes. Ils y procèdent alors à l’abattage des forêts de palétuviers pour cultiver la terre. Ce faisant, ils se servent du bois pour cuisiner, construire leurs maisons et fabriquer des pirogues. De grandes entreprises s’installent et pratiquent la riziculture ou l’élevage de crevettes.

Pas de poissons sans mangroves

Dans le même temps, Madagascar dépend fortement de la pêche. Or, décimer les mangroves équivaut à détruire les zones de frai des poissons, qui ont dès lors de moins en moins d’occasions de se reproduire. En d’autres termes, la disparition des mangroves met l’avenir des pêcheurs en péril.

L’ONG belge Louvain Coopération, partenaire de la Coopération belge au Développement associé à l’UCLouvain, tente depuis 2006 d’inverser la tendance à Madagascar. Constatant qu’il lui serait impossible d’aider les pêcheurs si les mangroves continuaient de disparaître, l’ONG a décidé de planter, en collaboration avec la population, de nouvelles forêts de palétuviers dans la région du Menabe ou d’en restaurer les secteurs abîmés.

Et c’est une réussite ! Rien qu’entre 2017 et 2021, Louvain Coopération est parvenue à reboiser 180 hectares de mangroves. À cette fin, 482 000 propagules ont été plantées et 2630 habitants ont été sensibilisés à la protection des ressources naturelles.

Image
Locaux

Les populations locales sont très étroitement impliquées dans la restauration des mangroves. © Louvain Coopération

Impliquer la population locale

La clé du succès réside sans conteste dans l’étroite implication de la population locale. L’ensemble du projet est mené en dialogue avec les habitants, qui y participent activement. Ils collectent et trient les propagules, puis les plantent à marée basse. Le savoir de certains anciens est également mis à profit.

La côte et la mer sont indispensables à la survie d’une grande partie de la population. Il n’a d’ailleurs jamais été question de fermer complètement à l’exploitation des secteurs de la mangrove pour en faire des réserves naturelles. En revanche, il a été décidé en concertation avec la population d’interdire la pêche dans certaines zones pendant quelques mois. Les poissons peuvent ainsi frayer en toute tranquillité afin d’assurer leur descendance.

Les traditions locales sont respectées et les chefs des communautés rurales étroitement impliqués. Les autorités malgaches bénéficient d’un soutien dans la gestion des mangroves et la surveillance des zones protégées.

Des formations dispensées aux coopératives de pêcheurs leur ont permis d’apprendre à créer une plus-value en transformant le poisson. Les pêcheurs voient ainsi leurs revenus augmenter et n’ont plus besoin de couper autant de bois.

L’union fait la force

Louvain Coopération est très satisfaite de cette approche. Dans son nouveau plan d’action 2023-2027, financé par la Coopération belge au Développement, elle poursuivra son action. Elle entend également travailler au Bénin.

Louvain Coopération unit ses forces avec les trois autres ONG universitaires francophones : Eclosio de l’ULiège, FUCID de l’UNamur et ULB-Coopération. Ces ONG restaurent elles aussi les mangroves, plus particulièrement en RD Congo, au Sénégal, en Guinée et au Togo. La collaboration doit permettre l’échange de bonnes pratiques et une protection plus efficace encore de ces écosystèmes uniques.

En protégeant les mangroves, nous contribuons non seulement à favoriser la biodiversité (ODD 14) mais nous renforçons également les moyens de subsistance des pêcheurs (ODD 1) et nous participons grandement à la lutte contre le réchauffement climatique (ODD 13).