Puratos Grand-Place Vietnam : des cultivateurs satisfaits, un environnement sain et un chocolat exquis

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Visite du couple royal de Puratos Grand Place Photo de l'intérieur de l'école de boulangerie Puratos Grand Place, où sont exposés de nombreuses pâtisseries, pains et chocolats. Un homme donne des explications à la reine Mathilde sous le regard de quatre personnes

La Reine Mathilde visite l’école de boulangerie Puratos Grand Place lors de la visite d’État en avril 2025 (© SPF Affaires étrangères).

En 1994, le Belge Gricha Safarian s’est lancé dans une folle aventure au Vietnam : produire du chocolat durable. Avec un petit coup de pouce de la Société belge d’investissement pour les pays en développement, son entreprise est devenue un véritable modèle de réussite. À l’occasion de la visite d’État au Vietnam, en avril 2025, notre couple royal s’est rendu dans son école de boulangerie.

Nous avons rencontré l’entrepreneur belge Gricha Safarian en mars 2025, dans les bâtiments de la Société belge d’investissement pour les pays en développement (BIO), étroitement liée à notre SPF. Initiée en 2006, il y a 19 ans, la collaboration avec BIO a porté ses fruits ! Aujourd’hui, son entreprise Puratos Grand-Place s’impose comme le premier producteur de chocolat pour le secteur professionnel au Vietnam, occupant une part de marché évaluée à pas moins de 60 à 65 %.
 

Une noble cause


Dès ses débuts, l’entrepreneur s’est promis de ne pas se laisser guider par le seul appât du gain. « Engranger des bénéfices n’est pas un vice, rappelle-t-il. C’est le sang qui irrigue le cœur de notre entreprise. Mais nous y adjoignons une cause plus noble, créant ainsi un cercle vertueux : les bénéfices alimentent la cause, qui à son tour contribue aux bénéfices. »

Cette noble cause consiste à apporter une valeur ajoutée pour les producteurs et productrices de cacao mais aussi pour l’environnement. Dans cette optique, Gricha Safarian a initié le programme Cacao-Trace, qui non seulement offre un bonus aux cacaoculteurs et cacaocultrices pour leurs fèves, mais leur propose également des formations pour accroître leur production (voir plus loin).

Toutes ces initiatives ont contribué à forger le récit de Puratos Grand-Place, un atout non négligeable. « Aujourd’hui, on ne vend plus un produit mais une histoire, explique l’entrepreneur. Il ne faut pas présenter le chocolat lui-même, mais bien la manière dont nous le produisons. Et c’est ce qui nous distingue de nos concurrents. »
 

Sous le charme


Mais comment expliquer qu’un entrepreneur belge se retrouve à produire du chocolat au Vietnam, endroit bien moins féru de cette douceur cacaotée que l’Europe ? Gricha Safarian, qui avait déjà lancé en Belgique son entreprise chocolatière Grand-Place en 1985, se rend au Vietnam en 1993. « À l’époque, c’était encore un pays très pauvre, rappelle-t-il. Mais je suis tout de suite tombé sous le charme de la population. »

Résolu, l’homme décide alors de partir s’installer à Hô Chi Minh-Ville avec sa famille afin d’y produire du chocolat. Un projet considéré par beaucoup comme une folie. « La population locale n’avait même pas assez de riz pour manger à sa faim ».

Gricha Safarian persévère, connaît des hauts et des bas. En 2001, il loue un bâtiment et ouvre sa première usine, de taille modeste, employant une vingtaine de personnes. Il y fabrique du chocolat à partir de masse de cacao, une pâte à base de fèves fermentées qu’il achète.

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Photo de Gricha Safarian avec son personnel au centre de fermentation entre des sacs de fèves Cacao-Trace

Gricha Safarian avec son personnel au centre de fermentation entre des sacs de fèves Cacao-Trace (© Puratos Grand Place).

La rencontre avec BIO


« En 2006, nous nous trouvions à l’étroit dans cette usine, explique-t-il. J’ai voulu construire ma propre usine. Mais où trouver l’argent ? La Banque mondiale n’acceptait aucun projet en dessous de 5 à 10 millions d’euros, tandis que j’avais besoin de seulement 650 000 euros. Les banques en Belgique ne voulaient pas accorder de prêt pour un projet au Vietnam et les banques vietnamiennes ne se seraient pas risquées à soutenir un projet belge. »

Heureusement, l’homme croise le chemin de BIO. En 2006, la Société belge d’investissement, qui en est encore à ses balbutiements, prête une oreille attentive à son rêve d’entreprise. « La collaboration a été fantastique, se remémore-t-il avec satisfaction. Pendant les trois premières années, je n’ai dû rembourser que les intérêts. Ainsi, j’ai pu me concentrer pleinement sur la construction de l’usine. Lorsque les remboursements à proprement parler ont commencé, tous les trois mois, ils sont restés flexibles. »

Néanmoins, les exigences de BIO en matière de rapportage sur l’équilibre financier restent strictes. « Nous avons reçu quelques plaintes du personnel à ce sujet, mais ce contrôle nous a été utile : il nous a permis de nous améliorer. Nous avons aussi maintenu un dialogue ouvert. Je retournais souvent en Belgique et je passais régulièrement chez BIO. »
 

Un broyeur de fèves


À l’époque déjà, l’entreprise connaît le succès, mais Gricha Safarian veut aller plus loin. Il rêve d’une « intégration verticale totale ». En d’autres termes, il se donne pour objectif de maîtriser la chaîne de A à Z, de la fève de cacao à la barre de chocolat. Le tout au Vietnam, une première dans le monde.

Pour y parvenir, il lui faut des cultivateurs et des cultivatrices capables de lui fournir des cabosses de qualité, mais également une installation pour faire fermenter les fèves, les sécher au soleil et enfin les torréfier. En outre, une machine s’avère indispensable pour broyer les fèves torréfiées jusqu’à obtenir une pâte : la fameuse masse de cacao qui, associée à une matière sucrante et éventuellement à du lait en poudre, permet de fabriquer le chocolat.

Pour réaliser ce projet, l’entrepreneur se lance en 2012 dans une nouvelle quête de financement. Une fois de plus, il frappe à la porte de BIO. « BIO avait déjà pris de l’ampleur, les montants minimaux étaient plus élevés et les conditions plus strictes, rapporte-t-il. Avec ce rêve, je m’aventurais sur un terrain inconnu, mais BIO y a cru. J’ai reçu un prêt plus important, de 1,5 millions d’euros, et j’ai dû me plier à un exercice de rapportage encore plus astreignant. Les exigences en matière de durabilité étaient elles aussi élevées. Nous avons par exemple dû créer un comité dédié à cet aspect. Mais nous avons réussi ! »

Puratos a également rejoint cette folle épopée, au travers d’une joint venture. Cette entreprise familiale belge est un acteur mondial de la boulangerie, de la pâtisserie et du chocolat. « J’avais besoin d’un partenaire stratégique qui partageait les mêmes valeurs – ma noble cause – et je l’ai trouvé chez Puratos. »

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Photo de l'intérieur d'une serre où les fèves de cacao sont séchées sur de longues tables

Les fèves de cacao sont séchées (© Puratos Grand Place).

Le programme Cacao-Trace


Cette noble cause reste une composante essentielle de son modèle économique. En 2008, l’entrepreneur lance le programme Cacao-Trace, qui s’étend aujourd’hui à une dizaine de pays. « Avec Cacao-Trace, nous donnons aux cacaoculteurs et cacaocultrices un bonus en sus du prix du marché, explique-t-il. Le cultivateur ou la cultivatrice s’engage à respecter certains critères de qualité et reçoit en échange 12 cents supplémentaires par kilo de fèves. Ce bonus représente jusqu’à 2 à 6 salaires mensuels en plus chaque année. »

Ainsi, Gricha Safarian compte en quelque sorte parmi les pionniers du revenu décent. Cette « décence » vise la capacité des cultivateurs et cultivatrices à subvenir à leurs besoins et à maintenir leur activité. « Mais l’élément-clé de Cacao-Trace, c’est peut-être les formations que nous offrons. Les cacaoyers sont des plantes consommatrices de main-d’œuvre, bien davantage que les cocotiers. Il faut savoir greffer, tailler les arbres pour leur donner la bonne forme, les protéger des maladies en utilisant le moins de pesticides possible… Les quelque 2 000 cacaoculteurs et cacaocultrices qui me fournissent acquièrent toutes ces compétences pendant nos formations et en tirent une production significativement supérieure. Le rendement moyen à l’échelle mondiale est d’environ 400 kg par hectare et par an ; mes meilleurs éléments atteignent 1 500 kg ! Cette productivité influence grandement les revenus. » BIO a contribué à financer la mise en place de ces formations et l’expérimentation d’un modèle agroécologique.

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Photo d'un homme versant des fèves de cacao dans un grand tonneau bleu pendant qu'une femme regarde et prend des notes

Les fèves de cacao sont transformées (© Puratos Grand Place).

60 Days Chocolate


Gricha Safarian entend également réduire le plus possible son empreinte carbone. « Pour du chocolat classique, c’est surtout le transport qui entraîne une énorme empreinte carbone. Les fèves sont acheminées vers un pays, qui en tire par exemple de la masse de cacao. Cette masse est ensuite transformée en chocolat, dans un autre pays encore, pour le secteur professionnel, etc. Le délai entre la récolte de la cabosse et le produit fini s’étend de 12 à 16 mois. Mon meilleur produit, neutre en carbone, le 60 Days Chocolate, ne nécessite que 2 mois ! En moyenne, j’arrive à une durée de production de 4 à 6 mois. »

Par ailleurs, ce court laps de temps de la cabosse au chocolat garantit des saveurs plus intenses. «  On évite en effet l’oxydation à différentes étapes du processus. » L’entrepreneur peut en tout cas se vanter de produire un chocolat au goût exceptionnel. Il y parvient grâce à une fermentation très subtile des fèves, entre autres dans des fûts en bois d’acacia.
 

Des gâteaux d’anniversaire populaires


Désormais, Gricha Safarian dispose de points de vente au Vietnam et au Cambodge. Il exporte sa masse de cacao vers Puratos en Belgique, mais les États-Unis, l’Espagne, le Japon et la Chine achètent également ses produits. BIO a d’ailleurs financé en partie l’étude de faisabilité préalable à cet export.

« Le Vietnam, pays tropical, n’est pas vraiment adapté aux pralines. Elles fondraient trop rapidement, explique l’entrepreneur. Mon chocolat est surtout utilisé pour fabriquer des glaces et des biscuits au chocolat. Et bien sûr pour réaliser les très populaires gâteaux d’anniversaire. Qui dit 100 millions d’habitant(e)s, dit 100 millions de gâteaux par an ! » Puratos compte parmi sa clientèle des hôtels, des restaurants, des boulangeries-pâtisseries et des supermarchés.

Gricha Safarian se dit assez surpris de voir son affaire continuer à tourner si bien et sa part de marché de 60-65 % rester inchangée. « J’ai eu la chance d’être le premier. Et BIO m’a beaucoup aidé. Pour l’instant, je ne vois aucune concurrence. Elle apparaîtra bien un jour, mais c’est plutôt sain. Je suis prêt à l’accueillir. »

Une visite du couple royal à l’école de boulangerie de Puratos Grand-Place


La poursuite d’une « cause plus noble » constitue le principe directeur du modèle économique de Gricha Safarian. Celui-ci se montre dès lors extrêmement satisfait de son « école de boulangerie », inaugurée en 2023. « Chaque année, 25 élèves entament une formation de 2 ans en boulangerie, pâtisserie et chocolaterie. Toutes et tous connaissent des situations particulièrement difficiles, vivant parfois dans une extrême pauvreté. L’une de ces personnes appartenait par exemple à la cinquième génération de victimes de l’agent orange (NDLR : un herbicide toxique utilisé par les États-Unis durant la guerre du Vietnam). Nous prenons en charge les repas et le logement. »

L’école garantit un emploi à chaque élève au terme de la formation. « Après plus de 25 ans dans l’industrie du chocolat, je dispose d’un vaste réseau de clients. Bon nombre cherchent du personnel. De fait, des élèves reçoivent parfois une offre d’emploi avant même d’avoir terminé leur formation. Une entreprise belge a même trouvé utile de faire venir une de nos recrues en Belgique. »

Cette école de boulangerie ne pouvait évidemment pas manquer au programme de la visite d’État au Vietnam (du 30 mars au 4 avril 2025). Le roi Philippe et la reine Mathilde ont pu y échanger en toute quiétude avec les élèves. Nos souverains ont ainsi constaté de leurs propres yeux à quel point une formation de qualité peut transformer une vie et ouvrir des horizons.

La Bakery School Foundation de Puratos compte douze écoles, établies aux quatre coins du monde. La princesse Astrid a d’ailleurs visité une école de boulangerie au Brésil lors de la mission économique qui s’y est déroulée fin 2024.