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Macky Sall - Président du Sénégal et Président de l'UA - s'adresse aux dignitaires présentsau début du Sommet UE-UA. Assis (de gauche à droite) : Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, Charles Michel, président du Conseil européen, Emmanuel Macron, président de la France et représentant de la présidence française,
Moussa Faki Mahamat, président de la Commission de l'UA. © European Union
Les 17 et 18 février 2022 s’est tenu à Bruxelles le 6e sommet entre l’Union européenne (UE) et l’Union africaine (UA). Cette rencontre devait marquer un nouveau départ et permettre d'envisager un avenir porteur d’espoir dans le cadre d’un partenariat renouvelé. Comme l’a souligné Charles Michel, président du Conseil européen : « Nous souhaitions en faire un sommet différent, fondé sur le respect mutuel, dans le cadre duquel nous marquerions notre volonté d'agir ensemble sur un pied d’égalité, en renforçant notre écoute et notre compréhension mutuelles. »
L’UE, premier investisseur en Afrique
« Nos deux continents sont liés par des liens invisibles, a ajouté Charles Michel. Votre bien-être déterminera le nôtre. La prospérité de l'Afrique est dans l’intérêt de l’Europe […] Renouveler notre partenariat, c'est aussi nous engager ensemble sur des principes de confiance : la transparence, la responsabilité et l'efficacité. »
Malgré le discours récurrent selon lequel la Chine se montre très active en Afrique, la réalité des chiffres brosse un tableau différent. En 2019, l’UE a investi pas moins de 241 milliards d'euros dans le continent voisin, soit 5 % de plus qu’en 2016. Les États-Unis ont quant à eux engagé 42 milliards et la Chine, 38 milliards.
Les deux continents gagneraient énormément à mutualiser leurs atouts. En effet, l’UE est en mesure d’offrir non seulement des investissements publics et privés mais aussi un savoir-faire en matière d’infrastructures et de technologies vertes. L’UA, de son côté, dispose de ressources naturelles importantes, d’une impressionnante capacité d’innovation et de créativité ainsi que d’une population jeune et dynamique désireuse de contribuer à l’activité du continent.

La table ronde sur le financement d'une croissance durable et inclusive, en présence de Christine Lagarde (3ème en partant de la gauche). © European Union
7 tables rondes
Cette fois, aucun discours pré-écrit. Pour permettre des discussions franches et ouvertes, les dirigeants ont choisi de mener les discussions autour de sept tables rondes thématiques, chacune présidée par un ou deux pays de l’UA et un ou deux pays de l’UE. Participaient également aux ateliers un ou deux experts. Ainsi, Christine Lagarde, présidente de la Banque centrale européenne, a pris part à la table ronde consacrée au financement d’une croissance durable et inclusive.
Aux côtés de ses collègues du Rwanda, d’Allemagne et d'Afrique du Sud, le premier ministre Alexander De Croo a présidé la table ronde consacrée aux systèmes de santé et à la production de vaccins. Parmi les autres thèmes abordés, les débats ont porté sur « le changement climatique et la transition énergétique », « l’agriculture et le développement durable » ou encore « la paix, la sécurité et la gouvernance ».
Les échanges ont abouti à une déclaration finale ambitieuse. Pour éviter qu’elle ne reste lettre morte – comme ce fut parfois le cas précédemment –, un mécanisme de suivi a été instauré. Les dirigeants européens et africains, la société civile et le secteur privé surveilleront donc de près les avancées réelles des projets.
Parmi les accords dégagés :
- Un paquet d’investissement de 150 milliards d'euros contribuera à la mise en place « d’économies diversifiées, inclusives, durables et résilientes ». Parmi les domaines prioritaires, on compte : la transition verte, une énergie et une électricité financièrement accessibles à tous, la transformation numérique, le soutien aux jeunes entrepreneurs, les transports, etc. Par ailleurs, une zone de libre-échange continentale africaine doit favoriser le commerce.
- Il est urgent d’assurer un accès équitable aux vaccins. D’ici la mi-2022, l’UE s’engage à fournir au moins 450 millions de doses de vaccin à l'Afrique. La Team Europe (l’UE, les États membres de l’UE, la Banque européenne d’investissement et la Banque européenne pour la reconstruction et le développement) a déjà mis 3 milliards de dollars à la disposition du programme COVAX. S’y ajoutent 425 millions d'euros alloués à la distribution des vaccins et à la formation des équipes médicales.
De plus, l’UE travaille avec la Belgique à la mise en place d’un centre de transfert de technologie pour les vaccins à ARNm en Afrique du Sud. Ce centre doit permettre la production locale de vaccins et d’autres produits pharmaceutiques. À cette fin, un compromis relatif aux droits de propriété intellectuelle est en voie d’élaboration avec l’Organisation mondiale du commerce (OMC).
À l’initiative de l’UE et de l’UA, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) compte mettre au point un traité international sur les pandémies d’ici 2024. Le monde serait ainsi mieux armé contre les futures crises de ce type.
- L’UE et l’UA veulent renforcer la collaboration entre leurs universités et chercheurs respectifs. Elles souhaitent inciter plus de jeunes, de volontaires et d’étudiants à prendre part au programme Erasmus+. Elles s’efforceront également de faciliter les échanges culturels et artistiques.
- L’UE et l’UA dépendent l’une de l’autre pour leur paix et leur sécurité. C'est la raison pour laquelle l’UE soutiendra davantage les opérations autonomes de maintien de la paix menées par les forces de défense et de sécurité africaines (« des solutions africaines aux problèmes africains »). La notion de « sécurité » couvre aussi bien la sécurité maritime que la cybersécurité et la lutte contre le terrorisme.
La mise en place d’un climat de paix s’appuiera en outre sur la prévention des conflits et de la violence à l'égard des femmes, la promotion de l’État de droit et le respect des droits humains.
- L’UE et l’UA souhaitent une approche globale de la question de la migration et de la mobilité. La démarche inclut, entre autres, la lutte contre le trafic des êtres humains, un meilleur accueil et une intégration plus réussie des demandeurs d’asile légitimes, une gestion des frontières renforcée et une réinsertion durable après le retour ainsi que la détermination de voies de migration légale.
La situation requiert également de s’attaquer aux causes profondes de la migration irrégulière et des déplacements forcés. Les deux unions souhaitent dès lors soutenir davantage les formations technique et professionnelle, afin d’offrir à la jeunesse et aux femmes de meilleures perspectives d’emploi.
- L’UE et l’UA réaffirment leur attachement à un multilatéralisme effectif s’articulant autour des Nations Unies, qui se traduit par la réduction des inégalités mondiales ainsi que la promotion de la coopération internationale. Les Objectifs de Développement durable (ODD) et l’agenda 2063 de l’UA occupent à cet égard une place centrale. L’accord de Paris sur le climat reste lui aussi crucial. L’UE assistera l'Afrique dans sa transition juste vers la neutralité climatique et l’énergie verte.

Groepsfoto – de EU- en AU-leiders zijn bijna voltallig. © European Union
Le sommet UE-UA peut s’enorgueillir d’avoir été une réussite. Tous les dirigeants de l’UE y ont participé, ainsi que 40 des 55 chefs d’État africains. Onze pays de l’UA étaient représentés par un ministre de premier plan. Seuls quatre pays manquaient à l’appel : le Burkina Faso, la Guinée, le Mali et le Soudan. L’UA avait récemment suspendu ces pays à la suite de coups d’État.
Comme l’a expliqué Charles Michel lors de la cérémonie d’ouverture : « Nous aimons dire de nos deux unions qu'elles battent d'un seul cœur. Et nous voudrions davantage qu'elles parlent d'une seule voix […] Un proverbe togolais dit : "Là où le cœur est, les pieds n'hésitent pas à y aller." Nous savons, tous ici réunis, où est notre cœur. Nous allons maintenant tracer le chemin, et nous y engager. »
Le premier ministre Alexander De Croo à propos du sommet UE-UA
Le premier ministre Alexander De Croo a exprimé sa satisfaction à l’issue du sommet. « Nous nous sommes réellement entretenus d’égal à égal ». À titre d’exemple, il a cité l’accord conclu avec son homologue congolais concernant la restitution d’objets d’art acquis illégitimement au Congo.
Le premier ministre considère que les discussions parfois animées sur l’inégalité vaccinale, autour d’une table ronde qu’il a lui-même présidée, ont connu une issue favorable. La Belgique fait déjà tout ce qui est en son pouvoir : notre pays a produit plus de 60 % des vaccins contre la COVID destinés à l’UE et a offert onze millions de doses, soit une dose par Belge. En ce qui concerne les droits à la propriété intellectuelle au sein de l’OMC, une solution pragmatique doit être trouvée à très court terme.
La coopération en matière de climat constituait un autre point crucial du sommet. Par exemple, la Belgique prépare actuellement un partenariat avec la Namibie dans le domaine de la production d’hydrogène vert. Ce projet revêt une importance capitale pour les industries à forte consommation énergétique (acier, chimie, etc.) actives dans notre pays. En outre, la Belgique dispose également, grâce à Zeebrugge, d’un port d’approvisionnement en hydrogène vert.
Pour conclure, le premier ministre a affirmé que notre pays pouvait être très fier de l’organisation de ce sommet. « Un très grand nombre d’éminents dirigeants du monde entier ont été accueillis à Bruxelles et ont participé à un sommet fructueux. »
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