« Accompagner personnellement les Belges à l'aéroport, c'est une source de satisfaction »

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Personnel à l'aéroport de Dakar après le vol de rapatriement

Aéroport de Dakar : satisfait après un vol de rapatriement bien réussi

Dakar, la capitale du Sénégal, se trouve sur l'océan Atlantique, à l'extrémité occidentale de l'Afrique continentale. L'ambassade de Belgique est également située près de la mer, dans le quartier assez calme mais central du « Plateau ». De là, nous faisons un travail d'accompagnement pour les Belges bloqués au Sénégal, mais aussi au Cap-Vert, en Gambie et en Guinée-Bissau, afin de les rapatrier en Belgique.

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Dakar sur l'Atlantique

Vue de Dakar sur l'océan Atlantique. © iStock

Travellers Online

Le premier outil pour retrouver les Belges est Travellers Online : une base de données dans laquelle les compatriotes peuvent enregistrer leur voyage à l'étranger. De cette façon, l'ambassade est au courant de votre présence et peut vous joindre. Travellers Online a en tout cas fait ses preuves dans cette crise : grâce aux adresses e-mail, nous avons pu envoyer des messages à tous les voyageurs belges enregistrés dans la base de données. Sur la base des réactions - « Je suis toujours ici et souhaite être rapatrié » - nous avons dressé une liste des Belges qui souhaitaient rentrer chez eux.

Ce n'est évidemment pas si simple. De nombreux voyageurs ne se sont pas inscrits sur Travellers Online, d'autres ne regardent pas leurs e-mails, d'autres encore ne nous préviennent pas qu'ils sont déjà partis. Les listes des « voyageurs belges qui souhaitent rentrer » ne sont donc jamais définitives. Beaucoup de voyageurs échappent à notre radar parce qu'ils ne s'enregistrent pas ou ne se font pas connaître, tandis que certains sont sur la liste, mais sont partis depuis longtemps. Il y a aussi ceux qui ne veulent ou ne peuvent pas partir. Bien entendu, il y a également des personnes qui nous contactent spontanément, par e-mail ou par téléphone, et qui se retrouveront elles aussi sur les listes de retour.

Mais une ambassade, ce n'est pas une agence de voyages

Une fois que nous avons eu une meilleure vision des Belges voyageant dans notre circonscription, la Belgique a décidé d'organiser elle-même des vols de rapatriement : deux sur Dakar et un sur Banjul. Cela a permis aux cas les plus urgents - les touristes sans réseau local - de rentrer chez eux. Il s'agissait au total de plus de 450 Belges, ainsi que quelque 250 autres Européens.

S'il y a trop peu de Belges, il n'est pas utile d'organiser soi-même des vols de rapatriement. Dans ce cas, nous essayons de faire en sorte qu'ils voyagent avec des vols en provenance d'autres pays européens, généralement grâce à une concertation intensive avec nos pays voisins, à savoir les Pays-Bas, l'Allemagne, le Royaume-Uni, la France et le Luxembourg.

Nous avons même fait passer deux Belges de Gambie par l'Espagne : départ de Banjul, avec une escale au Cap-Vert, en passant par Madrid, Barcelone et finalement Amsterdam. Un travail complexe dans lequel il faut communiquer clairement et rapidement, tant avec les ambassades qu'avec les voyageurs potentiels. Au final, nous avons à chaque fois réussi à faire monter quelques dizaines de Belges sur ces vols « étrangers ».

L'exemple du Cap-Vert est éloquent : de cet archipel de 10 îles, 76 touristes belges sont déjà partis via 6 vols différents provenant de pays européens. Toutes les îles n'ont pas d'aéroport, les gens ont donc d'abord dû effectuer des connexions intérieures par bateau. D'autres îles étaient en quarantaine stricte et en « état d'urgence », il était très difficile de s'en échapper. Chaque vol a également ses propres critères et prix : certains sont gratuits, d'autres hors de prix. Allez donc expliquer cela aux touristes dont le vol retour déjà payé a été annulé pour une durée indéterminée. Une ambassade n'est pas une agence de voyages.

Des Belges qui gardent leur calme

La grande majorité des Belges qui veulent rentrer sont des touristes. Ils ont de toute façon prévu un court séjour et n'ont ni famille ni réseau sur place. Certains ont paniqué, mais de manière générale, tout s'est bien passé. Les Belges qui restent ici la moitié de l'année (les « saisonniers » et les « hivernants »), restent calmes. En effet, ils ont ici une maison, de la famille ou des amis chez qui ils peuvent rester plus longtemps.

Tout le monde ne désire pas rentrer en Belgique, et c'est un droit. Certaines personnes ne peuvent pas payer les vols de rapatriement, d'autres se sentent plus en sécurité ici. Le niveau des soins de santé n'est peut-être pas aussi élevé ici, mais les chiffres dramatiques du nombre d'infections et de décès dus au COVID-19 en Europe semblent assez effrayants. Mais in fine, tout le monde veut rentrer à la maison.

Pas de quarantaine comme en Europe

Pour l'instant, le Sénégal, et par extension l'Afrique, ont enregistré des chiffres relativement bas. Néanmoins, nous observons aujourd'hui (20 mai 2020) une nette accélération de 50 à 100 nouvelles infections par jour. Ces chiffres peu élevés sont une sous-estimation, ne serait-ce qu'en raison de la capacité de test plus faible et de l'infrastructure hospitalière limitée.

Il y aurait également un certain nombre de « facteurs inhibiteurs ». La population africaine est beaucoup plus jeune que la population européenne, et donc moins en danger de mort. Ensuite, il y a les « arguments moins scientifiques » : de nombreuses personnes prennent des médicaments qui peuvent avoir un effet inhibiteur (comme les médicaments antipaludiques). Le virus survivrait également moins longtemps dans les climats chauds, ce qui le rendrait moins susceptible de se propager.

Malgré ces facteurs inhibiteurs, le virus se propage en Afrique. Un récent rapport de l'OMS évoque même un potentiel d'un quart de milliard d'infections sur une période d'environ un an à plusieurs années. Des chiffres assez hallucinants, auxquels nous devrons éventuellement adapter notre réalité et notre style de vie.

Une quarantaine stricte à domicile est de toute façon impossible ici. Les vendeurs de rue, les marchands, les cireurs de chaussures, les agriculteurs... doivent descendre dans la rue, sous peine de n'avoir tout simplement pas de revenus. C'est le cas dans toute l'Afrique : une quarantaine stricte comme en Europe n'est pas possible. Pire encore, elle peut même carrément être « meurtrière ». Les mesures de confinement dans le monde entier envoient déjà des signaux alarmants, comme l'insécurité alimentaire croissante (qui a doublé en Afrique de l'Ouest) et l'absence de campagnes de vaccination.

En tant qu'employés d'une ambassade, nous ne pouvons pas non plus travailler à domicile. Mais notre poste a pris des mesures : horaires de travail limités, pas de réunions, pas de contacts extérieurs au sein de l'ambassade, garder une distance sociale, se laver les mains régulièrement et porter un masque buccal en cas de rencontre inévitable avec l'extérieur.

Des Belges satisfaits

Cela a été assez difficile. Au début de la vague de rapatriement, nous avons travaillé 21 jours sans interruption, parfois jusqu'à 15 heures par jour. Ça ne pouvait pas durer. Certains collègues ont eu des maux de tête et de gorge dus à la fatigue : le signe ultime qu'il était temps de lever le pied. Maintenant, nous travaillons à nouveau à un rythme plus vivable.

Et bien sûr, la situation s'est calmée : plus de 85 % des voyageurs belges sont rentrés. Ceux qui sont encore au Sénégal ne sont pas tous pressés de rentrer. Certains n'ont pas les moyens financiers de payer un vol de rapatriement. D'autres préfèrent attendre la réouverture de l'espace aérien afin de pouvoir prendre un vol commercial avec Brussels Airlines.

Dans l'ensemble, ce travail apporte beaucoup de satisfaction. Surtout sur nos propres vols de rapatriement : nous avons personnellement accompagné tous les Belges à l'aéroport. Nous recevons aussi des courriels de remerciement une fois qu'ils sont rentrés chez eux. Il y a évidemment des gens qui se plaignent, comme toujours. Mais en général, j'ai l'impression que la Belgique se porte plutôt bien et que les citoyens sont satisfaits de notre service.